Sébastien Gallice : « C’est une grande curiosité qui naît sur des nouveaux concepts »
Sébastien Gallice est président des Pharmaciens des Préparatoires de France (PREF) et pharmacien d’officine dans un des plus grands préparatoires de France, à Marseille. Il nous fait l’honneur de répondre à nos questions afin d’en savoir plus sur sa position concernant l’impression 3D de médicaments.
Pour commencer, pourriez-vous nous en dire en plus sur vous ?
Sébastien GALLICE – Je suis Sébastien Gallice, pharmacien titulaire de la pharmacie des Rosiers à Marseille. C’est une pharmacie un peu particulière puisque l’on fabrique énormément de préparations magistrales, c’est-à-dire de médicaments sur-mesure. Et je suis aussi le président des PREF, une société savante qui a pour objectif de promouvoir et de développer le bon usage de ces préparations magistrales.
On va s’axer sur votre fonction de pharmacien d’officine. Quelle pourrait être une journée type au sein d’une pharmacie comme la vôtre ?
Sébastien GALLICE – On va parler du préparatoire en particulier. C’est déjà faire le point sur quelles sont les demandes de mes confrères qui nous confient leurs préparations magistrales, est-ce qu’on est en capacité ou pas de produire l’ensemble des demandes, est-ce qu’on a toutes les molécules, est-ce qu’on est à même d’avoir libéré l’ensemble des lots nécessaire à. C’est s’assurer que l’ensemble de l’équipe est présente dans sa totalité, parce que s’il manque un peu de monde on aurait peut-être un peu de retard de production. C’est la journée type et son commencement. Et puis tout au long de la journée, on va regarder quelles sont les urgences peut-être, ou en tout cas nos capacités. Est-ce qu’on est à jour, est-ce qu’on est en retard, est-ce que la libération de ces préparations se passe bien, c’est-à-dire est-ce que les produits finis sont conformes à nos attentes, voilà avec des points très réguliers avec mes pharmaciens adjoints.
Parlez-nous des préparations magistrales en pharmacie.
Sébastien GALLICE – L’humain est le principal maître d’œuvre autour de ces préparations. Que ce soit la saisie de l’ordonnance que l’on nous a confié, on va la saisir et la transformer en recette numérique informatique, établir une traçabilité autour de tout cela et s’est confié à d’autres préparateurs qui eux, grâce à leur science, vont fabriquer manuellement ces médicaments, que ce soient des gélules, des sirops, des suppositoires, des pommades… On a tout un processus adapté.
Cette interview a lieu grâce à votre visite au sein de MB Therapeutics dans le but de rencontrer d’autres développeurs. Qu’en est-il de vos ambitions concernant leur technologie ?
Sébastien GALLICE – Pour moi c’est une première, c’est une grande curiosité qui naît sur des nouveaux concepts. Aujourd’hui on travaille, comme on l’a dit tout à l’heure, manuellement et est-ce que la technologie de demain va nous rendre service. En quoi et qu’est-ce qu’on peut attendre de ces impressions 3D de médicaments. Donc on est là pour discuter et voir ce qui est proposé, ce qui nous rendrait service et pourquoi pas envisager de progresser ensemble.
Avez-vous des exemples d’avantages potentiels que pourraient permettre l’impression 3D de médicaments ?
Sébastien GALLICE – Je prends un exemple très simple, on est limité dans nos préparatoires sur le type de formulations que l’on va faire. Et là l’équipe de MB Therapeutics m’a proposé des formulations pédiatriques dispersibles. Moi je trouve ça formidable. Je pense qu’en termes de qualité de production il y en a y redire, on est sur à peu près les mêmes standards. Cependant, amener un avantage supplémentaire et très important pour les mamans, les grands-parents qui ont des traitements spécifiques pour leurs enfants, je pense que c’est un atout extraordinaire. Là est le premier point.
Le deuxième point qui me paraît majeur aussi, c’est que l’on se doit de protéger l’ensemble de nos employés, et on manipule de plus en plus de produits très complexes, qu’on appelle dangereux, cancérigènes, mutagènes, reprotoxiques. Si ces impressions 3D nous permettent de nous mettre à l’abri de l’exposition de ces matières premières dangereuses, c’est aussi un énorme pas en avant pour la sécurité de nos préparatoires.
Il y a des valeurs ajoutées côté personnel et côté patient.
Sébastien GALLICE – Les deux et c’est ce que l’on recherche finalement, ce n’est pas qu’une valeur ajoutée personnelle, c’est vraiment qu’est-ce que j’apporte aux patients, outre la sécurité du dosage, j’aurai en plus peut-être des formules très adaptées.
Et d’un point de vue personnel, comment voyez-vous l’avenir de l’impression 3D de médicaments dans le contexte des préparations que vous évoquiez tout à l’heure ?
Sébastien GALLICE – : Je pense que c’est un nouvel outil très important on l’a dit, avec deux choses qui me paressent majeures. La protection du personnel c’est indéniablement un plus majeur. La création de formulations très spécifiques qu’on n’est pas en capacité aujourd’hui de produire dans nos préparatoires, formulations dispersibles. Et puis le gouvernement a établi sa feuille de route sur la gestion des pénuries de médicaments aujourd’hui. Il ne faut pas oublier qu’en 10 ans on a multiplié par 10 le nombre de ruptures, de spécialités; de 400 on est passé à plus de 4000, voire 5000 même. Est-ce que ces impressions 3D ne nous vont pas nous permettre de faciliter cette passerelle de santé publique, que les préparatoires aujourd’hui gèrent, c’est-à-dire, en absence d’amoxicilline par exemple, on a produit 7 millions de gélules, plus de 100 000 traitements par mois au moment du pic. Est-ce que ces impressions 3D ne pourraient-elles pas nous aider à être encore plus performant.
Vous croyez en l’avenir de cette technologie.
Sébastien GALLICE – J’y crois beaucoup et je pense que ça nous aider à progresser et aller encore plus loin et certainement ouvrir des schémas thérapeutiques, des schémas d’ajustements encore plus nombreux. On va parler peut-être du sevrage d’anxiolytiques, pourquoi pas, voilà, je sais que dans ce domaine-là il y a des besoins très importants, si on peut accompagner les cliniciens dans des essais thérapeutiques et ensuite établir des protocoles de désescalade de doses, ça peut être très important.
Pour finir, vous évoquez les cliniciens, les autres pharmaciens. Avez-vous un conseil à leur donner ?
Sébastien GALLICE – De rester curieux et de faire avancer les machines tout comme les hommes sur ces nouvelles opportunités.